Type Forming Machine

Type Forming and Composing Machine

T. Lanston, 1887. Appelée aussi « Embossing type-maker ».

Dans cette toute première machine, que T. Lanston conçoit entre 1883 et 1887 (brevets américains 364521 à 364525, déposés en 1885 et publiés en juin 1887), on trouve déjà les grands principes utilisés plus tard par la Monotype. Principales différences : les caractères ne sont pas fondus, mais emboutis sur des tiges de métal coupées dans un ruban qui se dévide au fur et à mesure de la composition ; et la machine utilise deux bandes perforées au lieu d’une plus tard.

Type Forming and Composing Machine (Monotype Recorder, 1937)

Le socle de la machine est en forme d’équerre. A la jonction des deux bras se trouve un axe vertical, relié à une force motrice. Cet arbre commande l’ensemble de la machine, et particulièrement 2 guides, sur le côté gauche et le côté droit, qui permettent de déplacer la grille contenant les matrices. La gravure ci-dessus (issue du Monotype Recorder, 1937) montre une vue générale de l’« intérieur » des deux bras.

Sur le schéma ci-dessous, qui représente le côté droit (vu depuis l’extérieur), on voit, à gauche vers la mi-hauteur, le dérouleur de bande perforée. Cette bande, à 14 « canaux », commande des contacts électriques reliés à des électro-aimants qui eux-mêmes déclenchent le déplacement de goujons situés plus haut. (Notons que le brevet prévoit déjà que les contacts électriques peuvent être remplacés par un dispositif à air comprimé pour « lire » les perforations de la bande.) A la partie supérieure de la machine se trouve une glissière sur laquelle coulisse un double bras (à gauche) dont la partie supérieure vient buter sur le goujon sélectionné par la perforation de la bande, et dont la partie inférieure est reliée au porte-matrices pour en déterminer la position.

Schéma issu du brevet US 364521

On voit, à l’extrême droite du dessin, la bobine qui « alimente » la machine en matière première. Cette bobine est formée d’un ruban (de plomb, ou d’un autre matériau) dont l’épaisseur est égale au corps désiré, et dont la largeur représente la « hauteur en papier » du caractère. Le ruban s’engage à l’intérieur de la machine, entraîné par 2 molettes, et est découpé à la demande selon la chasse de chaque caractère. La chasse est communiquée au mécanisme par la même perforation que celle qui détermine le déplacement du porte-matrices, car, comme dans les machines ultérieures, les matrices sont rangées en « colonnes » de même largeur, et ainsi la colonne sélectionnée détermine la chasse.

Les matrices, au nombre de 196 (soit 14×14), sont formées d’un petit bloc avec l’empreinte de la lettre côté inférieur, et se prolongent vers le haut par une tige cylindrique équipée d’un ressort pour les faire remonter après usage.

L’aile gauche de la machine a un aspect à peu près symétrique par rapport à la droite, mais le bras coulissant est actionné par la deuxième bande perforée, et détermine non pas la « colonne » mais la « rangée » de la matrice voulue. Par ailleurs, ce côté n’a pas de rôle dans la détermination de la chasse du caractère, mais, plus important peut-être, il permet la justification de la ligne.

Cette justification est décrite ainsi par Lanston. Dans un premier temps, en arrivant au bout de la ligne, on mesure la longueur restante et on compte le nombre d’espaces et de signes enregistrés. A partir de là, trois solutions sont proposées : 1. par augmentation proportionnelle de chaque ligne ; 2. par augmentation égale de chaque espace ; 3. par augmentation égale de chaque signe. C’est la première solution qu’envisage d’abord T. Lanston, ce qui a fait dire à nombre d’observateurs qu’il traitait le problème de la justification par un simple interlettrage, sans se soucier de l’aspect typographique ainsi obtenu. Mais sa machine, grâce à une modification qu’il décrit en détail, autorise bel et bien les deux autres modes. Et la machine qui succéda à celle-ci, c’est-à-dire celle dite « Triangle Monotype », utilise cette fois la justification par augmentation des espaces.

Bien sûr, dans cette première machine, comme dans les suivantes, les bandes perforées défilent dans le sens inverse de celui de la saisie, pour que la perforation déterminant la justification soit lue avant celles qui « codent » les différentes lettres. Cette perforation spéciale est distinguée des autres parce qu’à son niveau la bande qui défile côté droit n’est pas perforée. La bande ayant 14 « colonnes », il y aurait eu ainsi 14 valeurs possibles pour la chasse ajoutée à chaque lettre. L’unité n’est pas clairement précisée, mais il semble probable que T. Lanston ait envisagé le cinq centième de pouce. (Sur le système permettant d’obtenir les bandes perforées, l’inventeur reste vague et indique que cette partie sera traitée ultérieurement ; voir la page consacrée aux claviers).

La mise au point de cette machine qui provoqua la formation de la « Lanston Type Machine Company », à Washington, ne déboucha pas sur une commercialisation (il fallut attendre encore dix ans pour cela). Elle permet cependant de constater que T. Lanston, qui découvrait à cette occasion le monde de la typographie, en avait bien compris les principales contraintes et exigences.

Réf. : Richard E. Huss, 1973.
US Patent 364525.
Monotype Recorder, vol. XXXVI, 3, 1937.
Monotype Recorder, vol. XXXIV, 1, 1949.