Young et Delcambre
1840.
James Hedden Young (parfois orthographié Yung), de nationalité anglaise et Adrien Delcambre, Belge établi en France) inventèrent une machine, dénommée « compositeur typographique » ou « pianotype », composée d’un clavier-piano et de rainures verticales, dans lesquelles les caractères sont stockés, donc un système assez proche de celui proposé par le Dr Church 18 ans plus tôt. L’appareil mesure 1,45 m de haut sur 1 m de large et permettrait de composer 13 000 lettres à l’heure. Trois personnes sont nécessaires pour le fonctionnement de cette machine (en plus du « claviste », une personne pour la justification, manuelle, et une pour la distribution).
La machine (construite par J.G. Wilson (Clerkenwell, Angleterre) fut présentée à l’Exposition des produits de l’industrie, à Paris, en 1844, où elle obtint une médaille d’argent1. Elle fut essayée dans les ateliers de l’imprimerie Paul Dupont, sans succès. Cependant c’est la première machine à avoir été commercialisée en Angleterre : le journal anglais Family Herald était fier, dans son numéro du 17 décembre 1842, d’annoncer à ses lecteurs que la composition en avait été « entièrement exécutée par la machine à composer de Young qui […] a révolutionné l’imprimerie en résolvant le problème de la composition mécanique ». Elle fut aussi utilisée en France pour le premier livre composé avec une machine. Ce livre, Paris chez soi, revue historique, monumentale et pittoresque de Paris ancien et moderne, publié en 1855 chez l’éditeur Paul Boizard, fait figurer en frontispice une gravure où l’imprimeur s’enorgueillit d’utiliser les « procédés mécaniques d’Ad. Delcambre et Cie ». Le dessin est un peu différent du Pianotype d’origine, mais le principe est visiblement le même.
La dénomination de « compositeur typographique » avait déjà été utilisée, en 1826, par M. Tremblot-Lacroix, qui avait pris un brevet à Paris pour un « appareil vertical composé de rainures où sont placées les lettres. C’est à l’aide d’un chariot circulant sur un rail qu’on amène devant la rainure de la lettre demandée, que sont extraits, par un jeu de touches, les caractères qui se placent dans un composteur ».
Une mention est faite par Paul Dupont dans sa Chronologie de l’histoire de l’imprimerie (1853).
Voir également la machine Delcambre.
Un exemplaire de cette machine est conservé par le Musée des Arts et Métiers, à Paris.
- Voici un extrait du rapport du « jury central » de cette exposition : « […] malgré l’art avec lequel MM. Delcambre et Yung ont su combiner la longueur des canaux avec le temps plus ou moins long que met chaque lettre à les parcourir en raison de la pesanteur diverse des lettres, qui tantôt plus minces et tantôt plus épaisses, glissent plus ou moins rapidement, il arrive souvent que ces canaux s’engorgent par le concours de plusieurs lettres qui s’y rencontrent. […] Au moyen de la machine de MM. Delcambre et Yung, et en remplaçant par des femmes et des enfants le travail des ouvriers compositeurs, on obtiendrait une réduction de 4 à 5 fr. sur ce prix de 17 fr. 50 c. ; mais cet avantage sera-t-il assez grand pour décider les imprimeurs, surtout en province où le prix payé aux compositeurs est moindre qu’à Paris, à adopter ces mécaniques ingénieuses ? Le temps nous l’apprendra. » ↩︎