Thorne
1869.
La machine de l’Américain Joseph Thorne apparut pendant plusieurs années, dans sa catégorie des machines assemblant des caractères « froids », comme le seul concurrent des machines à composer fondant des lignes ou des caractères. Le premier brevet en fut pris en 1869, et la construction débuta en 1880 à Hartford, Connecticut (États-Unis).
Avec 2 000 machines en activité vers 18891, le succès était bien supérieur à n’importe quelle autre machine de sa catégorie.
En août 1895, la revue Scientific American lui consacre sa une, avec même une vue de l’usine d’assemblage…
Les caractères sont rangés dans les rainures constituant le cylindre du bas, qui est fixe ; le cylindre supérieur, lui, est mobile sur son axe et distribue les lettres qu’on lui fournit à l’aide de crans particuliers2. Le clavier (90 caractères, dont quelques logotypes) occupe une personne, et la justification en mobilise une autre, qui s’assoit à gauche de la machine. Un troisième ouvrier est chargé d’alimenter le système distributeur.
En bas du cylindre, un disque tournant à 300 tours par minute reçoit les caractères sortis des rainures; ceux-ci sont poussés vers le justifieur.
La conception est classique (et très proche de la machine Soërensen, qui lui est antérieure), mais la simplicité et la robustesse de construction de la machine assurèrent sa réputation jusqu’à ce que les systèmes Linotype et Monotype prennent le dessus sur des machines nécessitant des caractères crantés spécialement, ne justifiant pas automatiquement et munies d’une distribution peu pratique. La Thorne était vendue 12 000 francs en 1897.
En 1898 la Thorne Company devint l’Unitype Company, et différentes améliorations furent apportées, qui aboutirent à la Simplex (pour les journaux ou les livres) et à l’Unitype (d’emploi plus général).
Les derniers modèles furent construits par la maison Hoe (le colonel R. Hoe s’est rendu célèbre en construisant de remarquable presses rotatives).
Signalons un comparatif, paru dans Les Archives de l’imprimerie en 1899 (qui reprend un article paru dans le Journal des imprimeurs suisses), entre la machine Thorne et la Linotype, à l’avantage très net du système Thorne, quant à la qualité et au coût de la composition.
Le musée de l’imprimerie de Haverhill (Massachusetts, États-Unis) présente un exemplaire du modèle Unitype, un autre exemplaire est visible au musée de Carson (Californie). On pourra consulter également une brochure publicitaire publiée en 1894.
En Europe, le Deutsches Museum de Munich possède aussi un exemplaire de la machine Thorne (1884).
Réf. : Bulletin de l’imprimerie et de la librairie, 1889.
La Typologie-Tucker, juil. 1888.
Inland Printer, octobre 1889.
- Nombre de machines vendues en Angleterre et en Amérique. En Allemagne et en Suisse, une cinquantaine auraient été installées. ↩︎
- Dans le Bulletin de l’imprimerie et de la librairie, en 1889, on lit ce commentaire :
« Laissant de côté la complication excessive de cette machine qui amène de fréquents arrêts, nous ne nous occuperons que de la nature des fontes qu’elle exige. Chaque signe doit porter un crénage spécial d’une précision pour ainsi dire mathématique ; c’est la condition essentielle. Non seulement la solidité des lettres se trouve compromise par ce crénage, profond et presque toujours multiple, mais la précision ne saurait exister qu’avec du caractère entièrement neuf, et si, par suite de l’oxydation du métal ou pour tout autre cause, les lignes de distribution soit tant soit peu “collées”, la marche du cylindre distributeur sera bien hasardée. Nous voudrions voir fonctionner cette machine avec des caractères ayant passé trois ou quatre fois sous presse, ou même n’ayant servi qu’une fois au clichage d’un grand journal. » ↩︎