Lagerman

Lagerman

1884 et 1889.

Dite aussi « la Suédoise », « Typotheter and justifier ». On trouve également les dénominations « Universal Typesetter ». J.W. Chadwick, en Angleterre, reprit le principe de l’appareil à composer, le Typotheter, et lui apporta quelques modifications.

Alexander Lagerman était mécanicien-chef de la fabrique d’allumettes de Jönköping (Suède), où il mit au point un ensemble de machines pour automatiser la production. On peut d’ailleurs retrouver son souvenir sur le site de cette fabrique.

Il inventa deux machines distinctes.

La première, de conception très originale, permet d’accélérer la composition. Dans son système, la casse est conservée. L’appareil à composer (le « typotheter ») se fixe sur le rang. L’ouvrier saisit les caractères dans la casse comme d’habitude, mais avec les deux mains, et sans se soucier du sens ! Il jette « en vrac » (mais dans l’ordre, bien sûr) les lettres dans une espèce d’entonnoir. Là, des pinces « palpent » les caractères un à un et les retournent pour les mettre en position. On a prévu un cran spécial pour que la machine reconnaisse facilement le sens des lettres.

Celles-ci vont ensuite se ranger, en passant par un canal courbe, sur le composteur qu’on voit dépasser à gauche. Une sonnerie avertit de l’approche de la fin de ligne, et l’ouvrier glisse alors un cadratin métallique plus haut que les caractères, repère utilisé pour disposer les lignes dans la galée. L’appareil peut utiliser du corps 8, 9, 10, 11 ou 12.

Lorsque la galée est pleine, on la porte à l’appareil à justifier, qui constitue la seconde machine, remarquable par sa conception mécanique, et qui reprenait l’invention de C.W. Felt (dans laquelle des espaces provisoires étaient remplacées par des espaces de plus en plus larges).

Machine à justifier Lagerman

Le plateau à rainures, chargé de lignes de longueurs inégales, glisse de droite à gauche. A l’aide du levier situé en bas à gauche, l’ouvrier saisit une ligne entre deux mâchoires mobiles. En tournant le volant placé à droite, qui actionne l’ensemble de la machine, il fait remonter la ligne vers la galée de réception (qu’on aperçoit, partiellement remplie, plus haut). En chemin, la ligne rencontre un index qui, après chaque mot, déclenche un petit repoussoir, lequel fait tomber les espaces provisoires et leur substitue des espaces provenant de trois réservoirs (fines, moyennes, fortes). L’ouvrier justifieur fait échapper ces espaces en nombre suffisant, en réglant l’ouverture d’un tiroir gradué, d’après les indications d’un cadran situé à gauche.

La distribution se fait de façon classique, manuellement. Toutefois, les espaces sont triées par un troisième appareil, dans lequel on les fait glisser une à une.

Construit en Angleterre et présenté en France à l’Exposition universelle de 1889, le « Typotheter and justifier » était soutenu en France par MM. Berthier et Durey, qui avaient créé un petit rabot permettant de créer sur les caractères traditionnels le cran nécessaire au fonctionnement du système.

On considérait que la machine à justifier pouvait suivre la production de 4 machines à composer; celles-ci quadruplaient la production de l’ouvrier, en fournissant chacune 4 000 à 5 000 lettres à l’heure, au lieu de 1100 en moyenne en « levant » les lettres de façon traditionnelle. L’ensemble des 4 « typotheters » et d’1 « justifier » coûtait 8 500 F (le millier de signes était alors payé à l’ouvrier, en composition manuelle, entre 0,35 F et 0,70 F).

Le système Lagerman, très remarqué à son arrivée en France, fut commandé par plusieurs imprimeurs. Un exemplaire au moins fonctionna quelque temps à Paris.

Une machine attribuée à M. Winder, en 1871, aurait déjà utilisé le principe de l’entonnoir dans lequel l’ouvrier, des deux mains, peut envoyer les caractères qu’il a prélevés dans un « appareil à composer ». Et les frères Foucher, en 1880, intègrent également un entonnoir (en mouvement rotatif) dans leur appareil.

Signalons que la revue La Nature, en 1885, publia la description d’une « machine à composer Lagerman », très différente puisque réunissant sur un même appareil composition, justification et distribution, et dans lequel les caractères sont stockés dans des canaux verticaux. Cette machine aurait été « présentée aux imprimeurs de Paris ». Il semble que ce soit un premier essai de l’inventeur, qui aurait ensuite, devant la fragilité de sa machine, imaginé un procédé à la fois plus original et plus simple.

Réf. : Bulletin de l’imprimerie et de la librairie, nov. 1889.
L’Intermédiaire des imprimeurs, 1889.
La Typologie-Tucker, sept. 1889.
La Nature, 25 avril 1885.
Inland Printer, mars 1905 (notice nécrologique d’A. Lagerman).