Calendoli

Calendoli

1893.

Une production de 50 000 caractères à l’heure est annoncée par son constructeur, le révérend père dominicain Vincenzo Calendoli…

C’est à Paris qu’il présente, en 1893, sa « machine à composer simultanée », dite « machine Calendoli » ou encore « la dominicaine ».

Voici l’aspect de cette machine à ses débuts (avant les modifications apportées surtout par Aniello Saverese, collaborateur de Calendoli).

Machine à composer Calendoli (à gauche la pile alimentant les électro-aimants)

Voici la description de la machine, lors de ses premières présentations au public:

Un premier appareil est constitué par un clavier, où les touches, à contact électrique, sont disposées en 18 carrés de 30 lettres chacun. Dans chaque groupe voyelles et consonnes sont alternées, ainsi une voyelle est généralement encadrée par 4 consonnes, et l’on peut composer d’un seul coup des syllabes, en appuyant sur 2 ou 3 touches. 3 groupes (à droite) sont occupés par les capitales, les autres portent les bas de casse, et les ponctuations sont sur la rangée supérieure1.

Clavier de la machine Calendoli : 575 touches…

Un deuxième appareil, en forme de harpe, contient des tubes, remplis chacun de 150 lettres identiques, fermés par un verrou et disposés au-dessus d’une rigole par laquelle les lettres viennent se ranger dans un composteur.

Détail du mécanisme du verrou, actionné par un électro-aimant, libérant les lettres en bas des tubes. A droite, un caractère avec l’évidement permettant de les aligner sur des tringles.

Pas de distribution: les caractères sont refondus après usage. L’installation doit donc comprendre une fondeuse, avec un moule spécial, pour alimenter les magasins de la composeuse.

La cadence de production sera réévaluée au fil des ans à 40 000, 27 000 puis 16 000 caractères par heure. Mais, même à cette vitesse, la machine nécessite deux « dactylographes » l’un au clavier, l’autre ravitaillant le magasin, en alternance), 2 ouvriers justifieurs et corrigeurs, et un fondeur avec un aide.

Aniello Saverese, collaborateur de Calendoli, moine lui aussi, apporte des simplifications, surtout pour le clavier, jusqu’en 1908, où la machine prend l’aspect de la gravure. Installé sur 2 étages, le système restait imposant. Au premier, la machine à composer proprement dite, d’où les lettres partent vers le rez-de-chaussée en glissant sur des rails « à champignon » pour être reçues par l’ouvrier justifieur qui, après coupure de la ligne, place les espaces selon les indications d’une aiguille.

Machine Calendoli, 1908. 1. Vue générale
2. Caractères Calendoli enfilés sur un rail, à côté d’un caractère normal (La Nature, 3 nov. 1900)

Curieusement, cette machine qui ne fonctionna jamais réellement et qui n’avait pas d’avenir trouva un écho très favorable, y compris dans la presse grand public. Alors que le milieu de la presse en France restait aveugle à l’avènement de la Linotype, la machine Calendoli fut saluée par L’Illustration, puis par Le Figaro et Le Petit Journal, dans des articles vantant cette machine « aux résultats vraiment extraordinaires », appelée à « révolutionner l’art de l’imprimerie ». Certainement le résultat d’une bonne campagne de communication… Au Petit Journal, le directeur, Hippolyte Marinoni, qui devait devenir célèbre pour la mise au point de ses rotatives, ne croyait pas à la Linotype.

Malgré le talent des mécaniciens de la maison Foucher, « la dominicaine » n’est jamais rentrée en production. Apparue alors que déjà les Linotypes faisaient une entrée en force dans les imprimeries de journaux, en Angleterre sinon en France, cette machine, avec un principe de fonctionnement essayé tout au long du dix-neuvième siècle sans avoir  réussi à s’imposer, est pourtant mentionnée une dernière fois en 1926.

Réf. : L’Illustration, 23 février 1895.
L’Intermédiaire des imprimeurs, 15 mars 1895.
Les Archives de l’imprimerie, 1901.
Revue des arts graphiques.
La Nature, 3 nov. 1900.
Le Courrier graphique, sept.-oct. 1954.

  1. L’inventeur expliquait qu’il avait multiplié certaines lettres en raison de leur fréquence. Les différentes lettres d’un mot pouvaient être « plaquées » en même temps, avec plusieurs doigts, comme les accords au piano. Cela permettait la vitesse annoncée. Mais les doigts devaient être relevés l’un après l’autre dans l’ordre des lettres du mot, ce qui explique que la cadence ait été revue à la baisse… ↩︎