La composition typographique
Pour imprimer des textes en typographie, depuis Gutenberg (en Europe du moins), il faut assembler des caractères en plomb (plus exactement en alliage de plomb, étain, antimoine) pour former (« composer ») des mots, lignes, paragraphes, pages.
Pour ce faire, le typographe se tient devant la casse, sorte de tiroir formé de casiers, chacun contenant une sorte de caractères, et prélève une à une les lettres dans l’ordre du texte à composer, puis les dispose dans une sorte de réglette (le composteur, où une butée est disposée selon la longueur de ligne à atteindre), l’« œil » (c’est-à-dire la partie en relief représentant la lettre) disposé vers le haut pour surveiller son travail. Cette procédure représente la composition.
En arrivant vers la fin de la ligne, l’ouvrier doit apprécier l’espace séparant sa dernière lettre de la butée du composteur, et ajouter entre les mots la quantité d’espaces (petites lames de plomb, de différentes épaisseurs ; au féminin en typographie) nécessaires pour que la ligne soit « juste ». Cette opération s’appelle la justification.
Au bout de quelques lignes, quand le composteur est plein, le typographe dépose ces lignes dans un plateau (la galée) et reprend la composition de la suite du texte.
Avant de disposer les lignes de caractères sur la presse, il faudra « mettre en page » (créer les blocs de lignes représentant chaque page) et procéder à l’« imposition » (disposition des différentes pages imprimées ensemble sur la presse), mais ces étapes ne sont pas concernées par la mécanisation.
Enfin, quand le tirage est terminé, le typographe doit reprendre toute la composition, ligne par ligne, pour replacer chaque caractère dans le casier (« cassetin ») qui lui est propre, dans la casse d’origine. Le geste est alors inverse de celui de la composition. Cette opération s’appelle la distribution.
Depuis Gutenberg et ses premières impressions vers 1450 jusqu’à l’époque qui nous intéresse, la première moitié du XIXe siècle, ces trois procédures de composition, justification et distribution sont restées inchangées, alors que par ailleurs l’impression elle-même a bénéficié de la mécanisation et donc augmenté sa vitesse de production. C’est ce décalage qui la plupart du temps a conduit les inventeurs à proposer des systèmes pour mécaniser, partiellement ou totalement, la composition. On trouvera donc dans ces inventions des « machines à composer », des « machines à justifier » et des « machines à distribuer ». Bien sûr certains appareils combinent deux ou trois de ces opérations.